Le Fantôme Espagnol est une bande dessinée géniale de Willy Vandersteen, dessinateur belge considéré comme l’un des fondateurs de la BD flamande. Il a publié plus de mille albums à partir des années 40 et jusqu’à sa mort en 1990, les plus connus en France étant les aventures de Bob et Bobette. Cette série représentent pour moi l’exemple parfaitement incompréhensible d’une production de piètre qualité, parsemée de petits bijoux.
Si vous demandez à un hollandais ou à un belge s’il connaît Suske en Wiske, les noms bataves de Bob et Bobette, il vous regardera bizarrement, ceci étant une telle évidence. Comme si vous demandiez à un français s’il a entendu parler de Tintin. C’est d’ailleurs Hergé qui a demandé à Willy Vandersteen de rejoindre son équipe, car il voulait sortir une version néerlandaise de son hebdomadaire. Les histoires qui ont été créées à cette période pour le journal Tintin sont connues comme la série bleue, et représentent en fait huit albums : Le Fantôme Espagnol, La Clé de bronze, Le Casque Tartare, Le trésor de Beersel, Le Gladiateur mystère, Les Martiens sont là, Les masques-blancs, et La Cavale d’or, rebaptisé le cheval d’or dans les rééditions.
De cette série, les cinq premiers sont mes préférés. En dehors du fantôme espagnol, qui emmène Bob et Bobette au seizième siècle, par le biais d’un tableau de Bruegel l’ancien, le trésor de Beersel les envoie au moyen-âge, participer à la défense d’un château-fort. La clé de bronze permet d’ouvrir une porte mystérieuse cachée dans les profondeurs de la principauté de Mocano, mais délivre un monstre préhistorique qui menace de détruire le rocher. Dans la plupart des histoires, le voyage dans le temps se fait par le biais d’artifices sans véritable importance pour la crédibilité du scénario, comme dans le casque tartare, où ils se retrouvent au treizième siècle à Venise puis en Chine avec Marco Polo, et pour le Gladiateur Mystère, les héros sont directement placés à l’époque romaine.
L’auteur était particulièrement prolixe, et afin de créer et diffuser toute sa production, il a monté un studio de production au début des années 50, et réunit autour de lui un grand nombre de dessinateurs, scénaristes, encreurs, coloristes. Cela lui permettait de lancer les idées de scénarii, et de laisser ensuite ses collaborateurs terminer le travail. Je suppose que c’est pour cette raison que je n’apprécie guère 90% des albums, qui me semblent bâclés et inintéressants. On retrouve d’ailleurs souvent des idées d’une histoire, reprises dans une autre, quand ce ne sont pas les dessins eux-même (comme par exemple ci-contre le cheval du trésor de Fiskary, et celui de la cavale d’or).
Bob et Bobette sont accompagnés de la tante Sidonie, caractérisée par un nez particulièrement long, amoureuse de monsieur Lambique, plombier de son état, plus tard rejoints par petit Jérôme, doué d’une force incroyable. Le professeur Barabas leur permet de voyager, par l’hypnose au début, puis avec ses machines loufoques. La poupée de Bobette, Fanchon, ou Fanfreluche, a également un rôle prépondérant dans plusieurs histoires. Lambique surprend toujours par son comportement, comme ci-dessous, revenant d’un séjour en Angleterre.
En dehors de la série bleue parue dans le journal Tintin, il y a plusieurs albums qui m’ont marqué par leur inventivité, leur humour, et leur poésie décalée : la Nef Fantôme, avec des vikings, des lemmings, le roi Hermine et sa douzaine de petites princesses adorables, le Trésor de Fiskary, qui nous emmène au XIIème siècle, avec des dragons et un cheval qui parle, le Castel de Cognedur, où Jérôme rencontre son double en écosse, ou encore le Dompteur de taureaux, qui se passe en Espagne, avec une cantatrice qui montre bien l’influence d’Hergé…
On connait assez peu en France l’ensemble des productions du studio Vandersteen, mais après avoir dénigré les autres aventures de Bob et Bobette, je ne peux que conseiller les deux albums des aventures de Thyl Ulenspiegel (l’origine du mot espiègle), La révolte des gueux et Fort Amsterdam, réédités aux éditions du Lombard en 2009, et les aventures de Son Altesse le Prince Riri, débordant de fantaisie et d’invention, albums regroupées dans les années 80 à partir des planches parues dans le journal Tintin entre 1953 et 1959.
© Le Lombard/WillyVanderSteen
Une réponse sur « Le Fantôme Espagnol »
[…] comme le mystère de la grande pyramide et la Marque jaune, et la série bleue des aventures de Bob et Bobette, de Willy Vandersteen, dont j’ai parlé […]