L’homo sapiens est apparu sur cette planète Terre, il y a 300 000 ans déjà, soit environ 10 000 générations (ça ne nous rajeunit pas), et il s’est rapidement posé la question de savoir qui il était, d’où il venait, et essayé d’imaginer ce qui pourrait lui arriver après son bref passage ici-bas. Seule espèce à pratiquer l’humour (Pierre Dac répondait aux trois questions ci-dessus de manière définitive « Je suis moi, je viens de chez moi, et j’y retourne »), l’homme moderne a mis beaucoup de temps à structurer un langage qui lui permette de communiquer efficacement avec ses congénères, et de transmettre les connaissances acquises petit à petit, à sa progéniture.
Ça lui a pris quelques millénaires pour coloniser la terre entière, pour inventer l’agriculture afin de survivre plus efficacement, pour domestiquer les animaux dans le but d’assurer sa subsistance et ses déplacements, et pour exploiter -on pourrait dire surexploiter quand on voit ce qui se passe aujourd’hui- son environnement proche ou même ses semblables : l’esclavage reste pratiqué encore de nos jours dans certains pays, et près de deux millions de femmes sont vendues chaque année par les réseaux de prostitution.
Avant d’en arriver là, au milieu du néolithique, soit aux environs de 3600 avant J.C., l’invention de l’écriture va permettre de conceptualiser et de rationaliser le savoir. En n’ayant plus besoin de mémoriser systématiquement les connaissances, les hommes se sont posé de nouvelles questions, et pour y répondre, ont adapté les superstitions en créant des religions, qui sont encore aujourd’hui, avec la science, des tentatives de comprendre d’où nous venons, et pourquoi nous sommes sur cette terre. Les religions monothéistes ont une caractéristique étrange : elles partent du postulat qu’il y a un être suprême, qui aurait tout créé, omniscient et omnipotent.
Ce dieu est une image paternelle, rassurante ou menaçante, qu’il faut vénérer et respecter. Avec lui, les notions de bien et de mal, tout à fait inexistantes et parfaitement inutiles dans une nature où l’homme serait absent, ont été inventées, ordonnées, proclamées et imposées par les rabbins, les prêtres, les imams, ce qui permettait à l’époque de maintenir une communauté en interdisant à ses membres de s’entretuer, de désirer la femme de son voisin, de voler ses biens, et donc de s’en prendre plutôt aux tribus voisines, aux infidèles, aux sauvages et autres barbares, et de pratiquer allègrement et en toute bonne foi le saccage, le rapt et le viol, pour affirmer sa supériorité, et agrandir au besoin son territoire.
Dieu merci, si je puis dire, la science donne une autre explication du monde, en étendant notre vision à l’immensité de l’univers, avec l’exploration cosmologique, à l’extrême complexité de la matière, avec la physique quantique, à la création, avec la théorie de l’évolution et la génétique. L’esprit humain se rapproche petit à petit de la compréhension du grand tout, pour l’instant sans l’atteindre. Avec l’aide de l’informatique et de l’intelligence artificielle, on y arrivera peut-être ? Je penche plutôt pour la négative : on n’a pas besoin de tout comprendre, et c’est mieux ainsi. Comme le dit François Morel sur Arte : « On mourra moins bête, mais on mourra quand même. »
En résumé, depuis qu’il est sur terre, l’homme a donné ce nom de dieu à tout ce qu’il ne comprenait pas, et ces croyances d’un autre âge ont encore de belles années devant elles pour justifier ses mauvaises actions, ou glorifier les bonnes, ce qui revient au même… Sic transit gloria mundi.